Renaud Nicolas Petit se confie au Really Mirror

Renaud Nicolas Petit décrypte depuis plusieurs années les mutations de l’industrie textile, en particulier en Chine. Rédacteur en chef de The Good Goods et fondateur de Sinarum, il revient sur les enquêtes qui ont marqué son parcours, les réactions qu’elles ont suscitées et les sujets qu’il rêve de couvrir.
Bonjour Renaud Nicolas Petit, lequel de vos articles préférez-vous ?
Renaud Nicolas Petit : Je suis très intéressé par l’actualité du secteur que je couvre, mais je dois dire que parmi tous mes sujets, je suis particulièrement attaché à mes travaux sur les évolutions de l’industrie textile en Chine. La forme que prend le traitement de ces sujets m’enthousiasme spécifiquement. Au fil du temps, j’ai tendance à m’éloigner du relais d’actualité et je cherche d’avantage à m’appuyer sur des recherches approfondies et croiser les informations actuelles avec des analyses de long terme.
Dans Sinarum, j’ai notamment publié en février 2025 une analyse sur l’utilisation stratégique du patrimoine immatériel textile par le gouvernement chinois. Ce travail s’appuie sur des sources chinoises, des communications officielles en mandarin, des observations d’actions menées par Pékin en Europe, ainsi que des travaux académiques, notamment ceux du Centre d’étude français sur la Chine contemporaine (CEFC).
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Actuellement, je travaille sur une nouvelle enquête liée à la Chine, qui sera publiée prochainement dans The Good Goods.
Lequel de vos articles a eu le plus de retentissement ?
Renaud Nicolas Petit : Mes articles traitent principalement de thématiques B2B. Ils suscitent davantage de débats en coulisses qu’un large écho dans l’espace public. Néanmoins, j’espère contribuer à faire évoluer certaines discussions stratégiques au sein du secteur industriel.
En janvier 2025, par exemple, j’ai publié dans The Good Goods, un article qui visait à réunir les avis et les propositions de plusieurs acteurs de la mode sur la question des soldes, et notamment de leurs dates. Je sais que, depuis, ce sujet fait l’objet de discussions entre les acteurs du secteur, et notamment les fédérations professionnelles, afin de formuler des propositions structurées.
Dans Sinarum, un sujet qui a particulièrement fait réagir portait sur la consigne donnée par certaines banques chinoises à leurs employés de ne plus porter de vêtements de luxe européens.
Les réactions parfois hostiles, notamment sur LinkedIn, permettent de se rendre compte de plusieurs choses.
D’abord, elles témoignent d’un déficit d’information sur ces sujets en Europe.
Ensuite, j’ai constaté une incrédulité face à cette info. C’est un phénomène que j’observe souvent . Comme si les faits qu’on transmet semblaient parfois trop surprenants pour être vraisemblables aux yeux des Européens. On peut y voir un manque de formation en Occident, pour appréhender la logique et la capacité d’action d’un État autoritaire comme la Chine.
Je reçois aussi quelques réactions assez violentes lorsque mes articles dépeignent la Chine sous un angle critique.
Je m’interroge sur les motivations de ce que je perçois comme une volonté idéologique, de la part d’Occidentaux, de défendre l’image de la Chine, quelles qu’en soient les réalités.
Il n’y a évidemment aucune trace de sinophobie dans mon travail. Je suis sinisant, j’ai consacré une grande partie de ma vie à l’apprentissage du mandarin et à l’étude du monde chinois. Mon objectif est de parler de la Chine avec justesse. Critiquer certains aspects d’un pays, c’est aussi témoigner d’un attachement sincère et du souhait de voir les choses évoluer positivement.
Qu’aimeriez-vous voir se produire dans l’actualité pour pouvoir écrire l’article de votre vie ?
Renaud Nicolas Petit : Si je pense à des événements que j’aimerais voir se produire dans l’intérêt du secteur industriel que je couvre, plusieurs pistes me viennent en tête.
D’abord, j’aimerais voir la proposition de loi visant à réduire l’impact environnemental de l’industrie textile être finalement votée au Sénat et entrer en vigueur. Ce serait une avancée significative que je serais ravi de couvrir.
J’aimerais aussi que l’Union Européenne et le débat public européen prennent davantage en compte les questions liées au travail forcé, notamment dans les produits en provenance d’Asie ou de Chine. Sur cette thématique, il y a matière à écrire des articles marquants.
Merci Renaud Nicolas Petit
Merci Bertrand Jouvenot