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Quelques pensées 2.0 tirées de la philosophie de Pascal ?

Dans ses Pensées, écrites au XVIIème siècle, Pascal ne parle naturellement pas d’Internet. Pourtant, quelques passages écrits par celui sans qui, ni l’informatique, ni l’intelligence artificielle n’existeraient aujourd’hui, nous éclairent sur la façon dont le numérique nous pousse à pencher vers nos mauvaises inclinations.

« Il y avait un homme qui, […] à cet âge où les autres hommes commencent à peine de naître, ayant achevé de parcourir le cercle des sciences humaines, s’aperçut de leur néant, et tourna toutes ses pensées vers la religion ; qui, depuis ce moment jusqu’à sa mort, arrivée dans sa trente-neuvième année, toujours infirme et souffrant, fixa la langue qu’ont parlée Bossuet et Racine, donna le modèle de la plus parfaite plaisanterie, comme du raisonnement le plus fort ; enfin qui, dans les courts intervalles de ses maux, résolut, en se privant de tout secours, un des plus hauts problèmes de géométrie, et jeta sur le papier, des pensées qui tiennent autant du Dieu que de l’homme : cet effrayant génie se nommait Blaise Pascal ». C’est ainsi que Chateaubriand rend hommage à Pascal, en 1802, dans Le Génie du christianisme.

Dans ses Pensées, Pascal écrit des lignes de nature à nous faire méditer sur le temps que nous consacrons aux réseaux sociaux :

« Nous ne nous tenons jamais au temps présent. Nous anticipons l’avenir comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours ; ou nous rappelons le passé, pour l’arrêter comme trop prompt : si imprudents, que nous errons dans les temps qui ne sont pas les nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient. »

Il continue avec sévérité en écrivant :

« Ainsi, nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre, et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que nous ne le soyons jamais ».

Toujours dans ses Pensées, Pascal ajoute :

« Nous ne nous contenons pas de la vie que nous avons en nous et en notre être propre ; nous voulons vivre dans l’idée des autres d’une vie imaginaire, et nous nous efforçons pour cela de paraître, de travailler incessamment à embellir et conserver notre être imaginaire et négligeons le véritable.

Nous sommes si présomptueux que nous voudrions être connus de toute la terre, et même des gens qui viendront quand nous ne serons plus ; et nous sommes si vains que l’estime de cinq ou six personnes qui nous environnent nous amuse et nous contente. »

Pour clore ce bref florilège destiné à montrer combien la pensée de Pascal demeure actuelle, voici :

« Curiosité n’est que vanité. Le plus souvent, on ne veut savoir que pour en parler ».

Niklaus Wirth, l’inventeur du Pascal, le langage de programmation baptisé ainsi en hommage au génie, se doutait-il que le père de sa science éclairerait un jour ses enfants au sujet du digital ? Et ses enfants se doutent-ils au moins combien Pascal méritait d’admiration ?