Le client a toujours tord, mais pas pour longtemps encore
En entreprise, les clients ne participent jamais à nos réunions. Et comme les absents ont toujours tord, il devient facile d’oublier leurs véritables attentes. Mais l’IA pourrait bien changer les choses.
Paris, février 2030 – Un vent glacial souffle sur l’esplanade de la Défense. Une bruine froide a accélérer le pas des collaborateurs d’un grand groupe, jusqu’au 32ème étage d’une tour en verre, où ils sont attendus pour une réunion.
Celle-ci démarre à 9 heures tapantes, sans attendre les quelques derniers retardataires. Parmi l’assemblée il y a Tommy : un robot humanoïde, représentant le client de l’entreprise et destiné à recentrer toutes les réunions autour du client, tout comme les autres robots de son types qui siègent dans les autres salles de réunions de l’entreprise, pour y avoir la même fonction : Kate, Robin, Justin… Tous également des incarnations du client.
Tandis que les discussions s’engagent entre les participants, le robot Tommy, doté d’une intelligence artificielle, prend la parole chaque fois que ce qui se dit n’exprime pas en quoi cela sera bénéfique au client de l’entreprise. Ces interventions sont sans ambiguïté :
« Je ne vois pas comment ce que vous dites vas se traduire en bénéfice pour nos clients « .
« Quel est l’intérêt ou quel sera l’intérêt pour le client ? »
« Quel rapport avec le client ? »
Souvent Tommy agace. Il empêche de tourner en rond, met court aux échanges stériles, interrompt les beaux parleurs, empêche les jeux politiques, coupe la parole à la langue de bois, stop les propos confus ou brouillons. Pire, il oblige chacun à tourner plusieurs fois la langue dans sa bouche avant de parler et surtout à réfléchir dans le sens du client.
D’autres s’amusent de cette situation et tente d’utiliser un méta langage pour échanger des informations tout en échappant à la sagacité de la machine. Mais les capacités de deep learning de l’humanoïde, lui permettent de déjouer de plus en plus rapidement ces ruses grossières et vaines.
Robert, connu pour son franc parlé, voire ses propos rudes dignes d’un colonel de cavalerie, rétorque que Tommy ferait bien de se mettre en télé-travail.
Ce scénario futuriste rappelle combien il est facile d’oublier rapidement ce qui n’est pas sous nos yeux. Et si s’obliger à renouer le contact avec des clients en se rendant en magasin pour les observer, en pratiquant la double écoute en call centers, en lisant des rapports de social listening, en jouant les clients mystères, en pratiquant le day in the life, ou d’autres méthodes plus pointue comme la mobile ethnography ou le service safary… ne suffit plus pour penser client, en permanence et systématiquement. Une nécessité pourtant, pour l’entreprise du 21ème siècle en passe une nouvelle génération de concurrents, v=face à de nouvelles attentes, et ce au soin d’un écosystème global et connecté.
Plus proche de nous, les remises accordées aux collaborateurs sont finalement un bon moyen de s’assurer que tous les salariés vivent au moins une fois, si ce n’est régulièrement, une expérience a priori comparable à celles des clients de leurs entreprises. Mais cette pratique a ses limites :
Puisque remises ou pas, les salariés du BtoB n’achèteront pas les produits réservés à des entreprises, certes clientes de la leur. on voit mal Madame Martin acheté un scanner d’hôpital, sous prétexte que son employeur en équipe les cliniques de la régions PACA. Et encore moins, les salariés du genre masculin, acheter une crème dépilatoire pour femme, au prétexte qu’il travaillent dans une entreprise qui en produit (ce serait un vilain cadeau de Saint Valentin, n’est-ce pas).
Et que le retour d’expérience n’est pas organisé. Pourquoi d’ailleurs, ne pas conditionner la remise effectuer, au remplissage en ligne d’un formulaire post achat ?
Le travail de l’entreprise serait tout de même plus simple, s’il n’y avait pas de clients ! Cependant, comme aimait à le rappeler Henry Ford : « Ce sont les clients qui payent nos salaires. L’entreprise, n’est qu’un intermédiaire. » Mais au fait, que penserait ce même Henry Ford à qui l’on doit une organisation hyper rationaliste et productiviste du travail, si bien moquée dans les Temps modernes par Charlie Chaplin, de notre ami Tommy ?