Internet n’est pas encore une commodity
Les entreprises ont l’obligation de fournir à leurs collaborateurs : eau, chauffage et autres éléments nécessaires à leur sécurité, leur santé et leur bien-être. Un absent de taille ne figure pourtant pas dans cette longue liste : Internet.
Les fontaines à eaux et les extincteurs égayent comme ils peuvent les murs souvent tristes entre lesquels nos entreprises nous demandent de travailler. Ils figurent aussi sur la longue liste des obligations auxquelles les sociétés doivent de soustraire, parmi le chauffage, des salles de repos, parfois des vestiaires, un espace de restauration, une cantine, des espaces fumeurs, etc.
Curieusement, Internet que l’on considère désormais comme un produit de base (une commodity en anglais) et dont nous avons du mal à nous passer à la maison ou en vacances, n’y apparait pas. Pire, il n’est pas rare que les collaborateurs n’aient pas pleinement accès au web. Entre Wi-Fi sous performent, sites bloqués, accès restreints, bande passante saturée… nous sommes loin de pouvoir objectivement affirmer qu’Internet est une commodité dans les entreprises françaises.
La principale raison invoquée pour le justifier est la sécurité. Certes si l’entreprise n’est pas à l’abri de de la cyber-insécurité (ransomware, virus, malware et hacking en tous genres) il lui faut bien donner accès à l’écosystème dans lequel les entreprises se font peu à peu, qu’elles le veuillent ou non, qu’elles le comprennent ou non, aspirées. Mais comment positionner le curseur entre deux extrêmes ? Une entreprise complètement connectée à Internet, mais par conséquent vulnérable, d’un côté. Une entreprise complètement déconnectée du web et donc isolée, mais donc protégée, de l’autre. Les réponses sont alors cherchées du côté de la technique en explorant les options qui permettraient d’aboutir au moins mauvais compromis. En revanche, une approche centrée sur l’humain ne semble pas avoir trouvé un écho au sein de de entreprises. Certes, accorder des droits d’accès à Internet, sans restriction aucunes, à tous les collaborateurs, vingt-quatre heures sur vingt-quatre serait peut-être une folie. Mais ouvrir les accès seulement quelques heures par mois, le temps que quelques collaborateurs choisis puissent télécharger de nouveaux logiciels dont l’entreprise à peut-être besoin et dont qu’il serait dommage de ne pas au moins tester.
Les banques ouvrent bien les coffres forts de leurs agences pour qu’il puisse ensuite être acheminé en un lieu plus sûr. Un dispositif de sécurité spécial est mis en œuvre. Outre les fourgons blindés, il inclue le secret du jour et de l’heure de passage du camion… Pourquoi ne pas faire de même en entreprises. Prévoir des sessions d’accès complet au web, par quelques-uns mais pas toujours les mêmes, lors de périodes courtes de quelques heures, à des dates irrégulières et sporadiques. La surveillance et la sécurisation en deviendrait facilité.
Les salariés eux-mêmes sont les champions de l’auto censure
Le second motif qui pousse à limiter l’accès à Internet est plus officieux : les collaborateurs travailleraient moins puisqu’ils passeront plus de temps à regarder la météo, préparer leurs vacances, réserver des billets de spectacles, draguer sur Meetic… Quatre raisons peuvent renvoyer cette conception à la poubelle :
Tout d’abord, les collaborateurs font déjà tout ça via leurs smartphones personnels, pendant leurs heures de travail.
Ensuite, ne si l’argument était vrai, il faudrait également leur supprimer leurs téléphones de bureau qu’ils peuvent utiliser pour passer des appels personnels.
Enfin, les collaborateurs ont peur des représailles et savent bien que l’entreprises, si elle n’en a pas le droit, à la capacité technique de savoir ce qu’ils ont fait sur leur ordinateur.
Pour finir, à l’heure où les entreprises cogitent pour imaginer comment recréer du bien-être au travail, allant jusqu’à recruter des Chief Hapiness Officer, des coachs, des psychologues, peut-être devraient-elles admettent que l’évasion que permet Internet y participe. Qui n’a pas regarder des photos du superbe hôtel avec piscine débordante de ses prochaines vacances, la vidéo du futur modèle de voiture dont ils rêvent, une recette de cuisine…
Il y a vingt-cinq ans, voyant bien qu’il serait difficile pour monsieur et madame tout le monde, d’apprendre à utiliser une nouvelle machine, un micro-ordinateur, Microsoft eu la géniale idée d’insérer des jeux sur les ordinateurs comme des solitaires, précisément pour que les personnes jouent et s’approprient l’usage de leur PC : souris, clavier, interface… pour mieux travailler ensuite. Combien de temps faudra-t-il encore pour que l’entreprise accepte l’humain tel qu’il est ?