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Management : les idées reçues prennent feu

Le management pris en tant que discipline est désormais arrivé à maturité. Mais dans la pratique, il en est autrement. Pire, certaines vérités et méthodes bien établies, utilisées sans le discernement nécessaire, peuvent s’avérer largement contre-productives. Exploration.

 

L’idée reçue : Les incentives financières permettent d’atteindre de meilleurs résultats.

Faux et archi-faux. Selon Daniel Pink, l’ancienne plume d’Al Gore et l’auteur de quatre livres traitant de l’évolution du monde du travail en général et de la motivation en particulier, les véritables leviers de la motivation des individus seraient au nombre de trois :

  1. L’autonomie ou l’ardent désir de diriger soi-même sa propre vie.
  2. La maîtrise ou le besoin de s’améliorer constamment dans un domaine qui compte à nos yeux.
  3. Le sens ou le sentiment que ce que nous faisons est au service d’une cause supérieure.

Une thèse qu’il expose dans une conférence TED au travers des résultats d’une expérience menée avec le problème du chandelier de Duncker (1945).

Au travail

Dans cet exercice, sont fournis aux participants un chandelier, une boîte remplie de punaises et une boîte d’allumettes. Puis, il leur est demandé de fixer le chandelier au mur. La solution est simple, mais il faut souvent du temps avant qu’un individu ou un groupe ne la trouve. Généralement, les esprits créatifs ont un avantage dans la mesure où ils ne considèrent pas la boîte  remplie de punaises comme un simple élément nécessaire à la fourniture des punaises, mais comme un des ingrédients de la résolution du problème.

La solution est, comme souvent dans ce type de jeu, très simple. Il suffit de vider la boîte à punaises, fixer la bougie au fond de la boite en ayant préalablement fait un peu fondre sa base avec la flamme d’une allumette afin de la coller. Puis il ne reste plus qu’à punaiser la boîte contre le mur.

Résultats

L’observation effectuée par Daniel Pink est saisissante. Si vous constituez deux groupes en disant à l’un qu’il gagnera d’autant plus d’argent qu’il trouve la solution rapidement et à l’autre qu’il remportera la même somme d’argent peu importe le temps mis à résoudre le problème, le premier groupe se montre largement moins efficace que le second. Pire le premier groupe se révèle même contre-productif.

Mais l’expérimentation ne s’arrête pas là. Si l’on reproduit l’expérience en présentant cette fois-ci les éléments de départ (la boîte de punaises, le chandelier, etc.) en ayant pris soin de dissocier la boîte de punaises des punaises, il devient évident pour les groupes que la boîte fait partie de la solution. Et cette fois-ci, le premier groupe, qui gagnera d’autant plus d’argent qu’il trouve la solution rapidement, performe beaucoup mieux que le second.

Daniel Pink en conclut que les incentives financières sont plus pertinents pour les tâches routinières, les tâches basées sur le respects de règles, que pour les tâches nécessitant de la créativité.

Moralité

Pour les tâches créatives, ce serait en réalité des motivations intrinsèques à l’individu qui l’animent : autonomie, maîtrise, sens… Une conclusion étayée par le service clients de Zappos dont les collaborateurs se sont eux-mêmes baptisés ZCLT (Zappos Customer Loyalty Team) et se sont donnés des instructions simples :

  • Servir le client
  • Résoudre son problème
  • Le faire comme vous l’entendez.

Ce surcroît d’attention portée au client et le cœur mis à l’ouvrage infuse de l’autonomie, de la maîtrise et du sens au sein de ce département dont les tâches ne sont pas toujours gratifiantes. Plus en phase avec la devise de leur société « delivering happiness » les ZCLTs réalisent leur travail avec plus de bonheur, ce qui se traduit aussi dans les résultats puisque le service client de Zappos est souvent bien positionné dans les comparatifs.