Déterminer les chances de réussite d’un projet en vous amusant
Les chances de succès d’un projet sont faciles à évaluer à l’avance. Une cartographie aussi amusante que réaliste permet de classer les projets de manière inédite, après avoir calculé sérieusement leur risque d’échec au moyen d’une formule aussi simple que fiable.
La formule magique
Les stakeholders ou parties-prenantes en français : Le nombre de personnes impliquées dans un projet intervient nécessairement sur sa réussite ou son échec potentiel. Plus il y a de monde, plus les risques de désaccord, de rivalité, d’incompréhension, de confusion entre les uns et les autres augmentent et impactent mécaniquement le projet. Sans oublier que les parties-prenantes sont souvent internes à l’entreprises et externes à celle-ci. De quoi ajouter des difficultés.
La complexité : Elle se mesure sur une échelle allant de 1à 10. certains projets sont extrêmement simples tandis que d’autres sont éminemment complexes. Cette complexité reposera sur une multitude de critères tels que la nouveauté du projet pour l’entreprise, les compétences qu’il nécessite, les domaines concernés, les conditions dans lesquels il émerge, le contexte dans lequel il intervient, la variété des métiers qu’il fait intervenir, la sensibilité des données qu’il concerne, les éléments qu’il produit, les intelligences individuelles et collectives qu’il requiert, etc.
La clarté : Elle peut se mesurer elle aussi avec une échelle allant de 1 à 10. Combien de projet ont désamarré sans même que ceux qui y participent soient capables de dire une phrase aussi simple que : « Le projet consiste à … » à son propos. Si la clarté à une note de 10, c’est que la vision est claire, les objectifs explicites et atteignables et les résultats mesurable. A contrario, si la clarté a une note de 1, c’est que le projet est déroutant pour qui que ce soit, y compris celui ou celle qui l’a initié. Le score de clarté inclue le fait d’avoir des objectifs clairs, des critères de succès définis et une feuille de route.
Ceci étant posé, l’équation permettant de déterminer la réussite future d’un projet est simple. La voici :
(Stakeholders X Complexité) / Clarté = Niveau de difficulté
Ainsi un projet comprenant 3 parties prenantes, ayant un score de complexité de 4 et un score de clarté de 2 donnera :
(3 X 4) / 2 = 6
soit un score de difficulté plutôt moyen, voire relativement faible
Un autre projet comprenant 10 parties prenantes, ayant un score de complexité de 10 et un score de clarté de 5 donnera :
(10 X 10) / 5 = 20
soit un score de difficulté élevé
Un autre projet encore, comprenant 1 parties-prenantes, ayant un score de complexité de 1 et un score de clarté de 4 donnera :
(1 X 1) / 4 = 0,25
soit un score de difficulté très faible
Aussi trivial que puisse paraître cette formule n’en est pas moins fiable.
Quel monstre se cache derrière votre projet ?
Le projet « Zombie ». Il s’agit d’un projet qui, tel un zombie, a littéralement aspiré toutes les neurones disponibles des équipes, mais qui ne meurt pas, puisqu’il est la danseuse du président de l’entreprise.
En apparence, il n’y en a qu’un staheholder, le numéro un de la société. Mais en réalité ils sont deux, si l’on prend en compte son ego. Le véritable challenge est de convaincre notre dirigeant et son ego de nous laisser tuer ce projet pour de bon.
La complexité est simple. Le projet n’ayant pour fonction que d’épuiser les ressources intellectuelles des collaborateurs, leurs ressources physiologiques, leurs motivations… Si ce type de projet nous conduit à nous réunir les uns les autres, le risque est de s’enfermer dans un cycle infernal de réunions visant à essayer de donner un sens, une raison d’être, une méthode, une organisation au projet lui-même.
La clarté se traduit par une sorte d’hallucination que seule le numéro un visualise tandis que tous les autres anticipe la mort du projet.
Le projet du « chat de Schrödinger » est appelé ainsi puisqu’il avait le soutien du comité de direction il y a une seconde, mais ne l’a plus la seconde qui suit. Le projet est en fait terminé avant même que nous ayons eu le temps de dire s’il s’agissait ou non d’un projet. Il existe sans exister. Il est bien là sans réellement être là…
Les stakeholders sont trop nombreux et personne n’est en mesure de prendre une décision relative au fait que le projet doit avancer ou non. Si quelqu’un l’a fait, personne n’était là pour l’entendre.
Ce n’est pas tant que le projet soit complexe, c’est que nous sommes comme ces scientifiques réalisant l’expérience du chat de Schrödinger, dans impossibilité de dire si un chat caché dans une boîte est vivant ou mort et donc conduit dans l’impasse consistant à conclue qu’il est à la fois vivant et mort.
La clarté est rapportée à sa plus simple expression. Soit le chat est mort, soit il est vivant. Soit le projet est vivant, soit il est mort. Le projet est en fait souvent très clair, mais personnes parmi les parties prenantes n’est en mesure de prendre la décision qui permettra au projet d’avancer, ne serait-ce que d’un iota.
Le projet « Blob » ou pâté en français est ce type de projet à propos duquel vous entendez à la machine à café : « Je suis pas certain d’avoir compris, mais apparemment il s’agit d’un projet qui à à voir avec l’augmentation du brand equity, qui de ce que je comprends est un code pour dire quelque chose, mais je ne sais pas très bien quoi ». Il s’agit d’un projet amorphe du fait qu’il peut tout englober comme rien englober.
Les stakeholders sont aux anges. Le projet est tellement flou que tout le monde peut se considérer comme une partie prenante et que tous ceux qui n’ont pas envie de travailler à ce projet peuvent considérer qu’ils ne sont pas concernés.
La complexité n’est pas élevée en tant que telle, le projet étant simplement en perpétuelle déviation d’une trajectoire qui n’a jamais réellement été définie.
Oublions les parties prenantes et la complexité, le flou qui entoure le projet suffit à le faire disparaître. Ce type de projet condamne les équipes à poser des questions pour mieux cerner le projet aux dirigeants, tandis que ces derniers attendent des points d’avancement du projet.
Le projet « Fog » ou pourquoi faisons-nous ce projet ? Personne ne sait véritablement mais apparemment c’est pour des raisons importantes et surtout stratégiques. Le projet est incroyablement spécifique et comporte des exigences monstres mais est entouré d’un grand mystère.
Les stakeholders se résument à quelques membres de la direction et des partenaires externes, qui savent très précieusement ce qu’il faut faire et comment, mais pensent que la manière dont s’y prend l’entreprise pour mener à bien le projet n’est pas la bonne.
Bien que pas nécessairement complexe, ce type de projet requiert de piloter un grand nombre de tâches qui exige énormément d’attention collective pour que le projet continue d’avancer.
Si les exigences sont clairs, les raisons le sont moins. Les indicateurs du succès sont manifestement connus de la direction, enfermée dans une tour d’ivoire.
Le projet « Shapeshifter » ou métamorphose en français, fera dire à vos collègue : « C’est drôle j’avais l’impression d’avoir bien saisi le projet la semaine dernière, mais aujourd’hui je suis complètement perdu ! » Ici, chaque réunion ou revue de projet sera l’occasion d’en changer les contours ou les priorités, de transformer la vision initiale et de définir de nouveaux critère de mesure du succès.
Les stakeholders ne sont pas le problème ici. Le problème est qu’ils changent d’idée toute les semaines.
La complexité est mouvante. Le projet prend une nouvelle forme à chaque contact avec l’un des collaborateurs. les objectifs sont changeants, les priorités aussi et les contradictions et autres vas et vient ainsi engendrés rendent la réalisation du projet quasi impossible.
La clarté fait le yoyo. Nous avions l’impression d’avoir des objectifs clairs il y a encore une semaine. ils ne le sont plus à présent. D’autres sont même apparus, venant d’on ne sait où. Nous sommes dans le brouillard.
Le projet « Dr. Jekyll & Mr. Hyde » change de visage selon qui l’on croise dans les réunions qu’il engendre. Tantôt simple, tantôt incroyablement terrifiant, le projet a deux faces. Il pourrait être simple, mais comme il empiète sur plusieurs business units et que leurs dirigeants ont des objectifs différents, le projet pourtant simple, génère de grands moments de tension.
Le dédoublement de personnalité de ce type de projet est la conséquence d’intérêts ou d’objectifs opposés. Le nombre des parties prenantes pourrait être gérable en soit, s’il était possible de les mettre d’accord.
La complexité n’est pas nécessairement intrinsèque à la nature du projet mais résulte des tentions, des messages ambivalents ou contradictoires qu’il suscite.
La seule chose claire est ce que veut chaque partie prenante. Ce qui ne l’est pas, c’est comment parvenir à les mettre d’accord ou les faire avancer ensemble, afin de converger vers un intérêt commun.
Le projet « Frankenstein » réunit beaucoup trop de parties-prenantes sans qu’elles soient d’accord sur ceux à qui profitera le projet.
Les stakeholders ne sont pas si nombreux que cela, mais chacun à un demande, un besoin ou une exigence si monstrueuse que le projet en devient irréalisable.
La complexité est au plus haut point. Chaque nouvelle demande est plus importante que la précédente. C’est la surenchère entre elles. Tout le monde met la barre de plus en plus haut, s’accorde à dire que le projet cible est magnifique et que le résultat sera formidable.
La clarté est au beau fixe. Ce que chacun veut est clair. Le résultat espéré aussi. Mais il est également clair que personne n’est réaliste dans l’affaire.
Le projet « momie » est réellement emprisonné dans les méandres de la bureaucratie. Si l’on attend que les choses deviennent simplement possibles, il sera trop tard pour que le projet voit le jour.
Les stakeholders ne sont pas nécessairement nombreux mais très présents. A cheval sur les process, la conformité et la compliance sont leurs mots d’ordre, le rempart qu’ils érigent face à tout mouvement.
La complexité provient du fait que rien jamais assez compliant. Chaque validation engendre une nouvelle phase de validation.
La clarté est plutôt élevé, puisque la minutie des stakeholders oblige à tout préciser et détailler. Les chemins sont même trop balisés au point d’empêcher tout mouvement.
Le projet « Dracula » ne verra jamais le jour puisque les vampires préfèrent la nuit tandis qu’il sapent l’énergie de l’entreprise le jour.
Il n’y a qu’un seul stakeholder, mais surpuissant, à qui une myriade de serviteurs sont tout dévoués.
La complexité est élevée car il y a toujours quelque chose qui manque au projet avant de pouvoir y mettre le point final.
La clarté est bien là mais sans fin. Elle se renouvelle éternellement, comme pour être constamment hors de portée, pour nous obliger à faire un pas de plus dans une quête sans fin.
Le projet « Godzilla » est tellement grand et complexe que les collaborateurs ne savent plus s’il faut rire ou pleurer, avant de se faire écraser par le monstre.
Les stakeholders sont nombreux puisque le projet impacte un très grand nombres de collaborateurs. Chacun est une ressource du projet autant qu’un utilisateur. Chacun y va de son opinion.
C’est le plus complexe des projets puisqu’il fait appel à des compétences et des composantes qui dépassent largement les participants.
Le projet est tellement clair, presque trop, qu’on le voit à cent mètres à la ronde.
De retour dans votre entreprise, il sa peut que vous soyez confronté à l’un ou l’autre de ces projets. Ou pire, que le projet dans lequel vous intervenez consiste justement à définir quel pourrait ou devrait être le projet. Souhaitons-simplement que ces quelques lignes vous aideront à faire éviter à votre société de produire des projets monstrueux.