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Leadership… et si tout avait été dit il y a 2500 ans ?

Le leadership fascine depuis des siècles. Dans son ouvrage devenu un classique The Practice of Management (1954), Peter Drucker affirmait de manière provocante que les premiers auteurs sur le leadership – les prophètes de la Bible, Eschyle et Xénophon – connaissaient tout du sujet.  Notre compréhension du leadership a-t-elle stagnée depuis ? En réalité les connaissances dans le domaine du leadership avaient déjà évolué avant cette affirmation et ont continué depuis.

 

Les anciens avaient compris que le leadership n’était pas seulement une question d’autorité, mais aussi de vision, d’éthique et de capacité à inspirer. Les grands empereurs de l’Antiquité dirigeaient par leur autorité morale et leur conviction, en mettant l’accent sur le pouvoir de l’objectif. Ils ont démontré que le leadership est profondément lié au sens de la mission, un principe qui reste crucial dans la stratégie organisationnelle moderne.

Eschyle, le tragédien grec, a exploré le leadership à travers le prisme du pouvoir, de la justice et de la responsabilité. Sa trilogie *Oresteia* aborde les défis de la prise de décision, le fardeau du leadership et la nécessité de faire preuve de sagesse et d’humilité. Les dirigeants d’aujourd’hui sont confrontés à des dilemmes similaires : concilier les objectifs de l’entreprise avec les considérations éthiques et les intérêts des parties prenantes.

Xénophon, soldat et historien, a rédigé l’un des premiers traités sur le leadership dans l’« Anabasse », son récit de la conduite de mercenaires grecs en territoire ennemi pour les ramener à bon port. Ses principes de leadership – communication claire, exemplarité et adaptabilité – sont d’une modernité frappante. Dans la *Cyropédie*, il analyse plus avant le leadership en présentant Cyrus le Grand comme un dirigeant idéal qui allie la réflexion stratégique à l’empathie, à la prévoyance et à la compréhension des motivations humaines. Ces idées anticipent les concepts contemporains de leadership transformationnel et d’intelligence émotionnelle.

 

L’évolution de la pensée du leadership avant Drucker

Bien que Peter Drucker ait eu raison de reconnaître les connaissances fondamentales du leadership dans les textes anciens, le domaine des études sur le leadership s’est considérablement développé avant 1954. Trois contributions essentielles ont remodelé notre compréhension de ce qui fait un leader efficace.

1. La théorie des traits du leadership

Apparue au début du XXe siècle, la théorie des traits suggère que les dirigeants naissent et ne se fabriquent pas. Des recherches pionnières menées par des psychologues comme Ralph Stogdill (1948) ont remis en question cette notion en démontrant qu’un leadership efficace dépendait d’une combinaison de traits de caractère et de facteurs situationnels. Cette perspective nuancée a déplacé le débat d’une qualité innée à une interaction dynamique entre la personnalité et l’environnement [1].

2. Les études Hawthorne et le mouvement des relations humaines

Menées entre 1924 et 1932 dans les usines Hawthorne de la Western Electric, ces études, dirigées par Elton Mayo, ont révolutionné la réflexion sur le leadership en soulignant le rôle des relations sociales et du bien-être des employés dans la productivité. Les résultats ont souligné l’importance d’un leadership qui favorise le moral, la communication et la collaboration – des concepts aujourd’hui au cœur de la gestion des organisations [2].

3. Le cadre des styles de leadership de Kurt Lewin

Les recherches menées par le psychologue Kurt Lewin dans les années 1930 ont mis en évidence trois styles de leadership fondamentaux : l’autocratie, la démocratie et le laissez-faire. Ses expériences ont démontré l’impact des approches de leadership sur la dynamique de groupe, la motivation et l’efficacité. Ses travaux ont jeté les bases des programmes modernes de développement du leadership qui mettent l’accent sur l’adaptabilité et la gestion participative [3].

 

L’évolution de la pensée du leadership

Si Drucker a eu raison de reconnaître les connaissances fondamentales du leadership dans les textes anciens, le domaine des études sur le leadership s’est considérablement développé avant 1954. Trois contributions essentielles ont remodelé notre compréhension de ce qui fait un leader efficace.

La théorie des traits de caractère du leadership – Parue au début du XXe siècle, la théorie des traits de caractère suggérait que les dirigeants naissaient et ne se fabriquaient pas. Des recherches pionnières menées par des psychologues comme Ralph Stogdill (1948) ont remis en question cette notion en démontrant qu’un leadership efficace dépendait d’une combinaison de traits de caractère et de facteurs situationnels. Cette perspective nuancée a déplacé le débat d’une qualité innée à une interaction dynamique entre la personnalité et l’environnement.

Les études Hawthorne et le mouvement des relations humaines – Réalisées entre 1924 et 1932 dans les usines Hawthorne de la Western Electric, ces études, dirigées par Elton Mayo, ont révolutionné la réflexion sur le leadership en soulignant le rôle des relations sociales et du bien-être des employés dans la productivité. Les résultats ont souligné l’importance d’un leadership qui favorise le moral, la communication et la collaboration – des concepts aujourd’hui au cœur de la gestion des organisations.

Le cadre des styles de leadership de Kurt Lewin – Les recherches menées par le psychologue Kurt Lewin dans les années 1930 ont mis en évidence trois styles de leadership fondamentaux : l’autocratie, la démocratie et le laissez-faire. Ses expériences ont démontré l’impact des approches de leadership sur la dynamique de groupe, la motivation et l’efficacité. Ses travaux ont jeté les bases des programmes modernes de développement du leadership, qui mettent l’accent sur l’adaptabilité et la gestion participative.

 

Les contribution au leadership plus récentes

Depuis l’époque de Peter Drucker, la recherche sur le leadership s’est profondément transformée, intégrant la psychologie, la sociologie et les sciences de gestion. Parmi les nombreuses contributions, l’une d’entre elles se distingue comme étant la plus influente : la théorie du leadership transformationnel.

Introduite par James MacGregor Burns en 1978, puis affinée par Bernard Bass, la théorie du leadership transformationnel se concentre sur la capacité des dirigeants à inspirer, défier et élever leurs subordonnés. Contrairement au leadership transactionnel, qui repose sur les récompenses et les punitions, le leadership transformationnel se caractérise par quatre dimensions clés :

Influence idéalisée – Les dirigeants agissent comme des modèles, font preuve d’intégrité et gagnent la confiance de leurs équipes.

Motivation inspirante – Les dirigeants formulent une vision convaincante, ce qui favorise l’enthousiasme et l’engagement.

Stimulation intellectuelle – Les dirigeants encouragent la créativité, l’innovation et la résolution de problèmes.

Considération individuelle – Les dirigeants offrent à leurs subordonnés des possibilités de mentorat et de développement personnel.

Cette approche a modifié le leadership dans tous les secteurs, des affaires à la politique, en passant par l’éducation. Les recherches montrent que les leaders transformationnels créent des équipes plus performantes, améliorent la satisfaction des employés et favorisent la réussite à long terme de l’organisation.

En outre, la théorie moderne du leadership a aussi été influencée par l’essor du « servant leadership » (Robert Greenleaf, 1977), du « leadership authentique » (Bill George, 2003) et du « leadership adaptatif » (Ron Heifetz, 1994), qui soulignent tous l’importance de l’empathie, de la résilience et de la prise de décisions éthiques dans un monde de plus en plus complexe.

À l’ère moderne, le leadership continue d’évoluer grâce aux nouvelles connaissances issues des neurosciences, de la psychologie comportementale et de la transformation numérique. Si les anciens nous ont transmis la sagesse fondamentale du leadership, les générations suivantes l’ont affinée, élargie et redéfinie. Le voyage de la pensée du leadership est loin d’être terminé.

 


Notes

[1] Stogdill, R. M. (1948). « Facteurs personnels associés au leadership : A survey of the literature ». *Journal of Psychology*, 25(1), 35-71.

[2] Mayo, E. (1933). *The human problems of an industrial civilization, Harvard University Press.

[3] Lewin, K., Lippitt, R., & White, R. K. (1939). « Patterns of aggressive behavior in experimentally created social climates ». *Journal of Social Psychology*, 10(2), 271-299.