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Pour l’instant, le télétravail et les réunions à distances sont plutôt subies

Le Covid a mis un frein net aux missions des sociétés de conseil. Certaines ont su en profiter pour se réinventer et embarquer avec elles leurs clients. C’est ce qu’est parvenu à faire Benjamin Gratton avec une clique de collègues. Cela valait bien un clic et surtout une interview à l’occasion de la sortie de leurs livre Animer à distance dans lequel ils racontent leur expérience.

 

Bonjour Benjamin Gratton, pourquoi avoir co-écrit ce livre… maintenant ?

 

Benjamin Gratton : Le 1er mars le monde s’arrêtait. En tout cas mon monde à moi… J’accompagne des équipes et des organisations pour les aider à prendre un enjeu, une problématique et en faire un projet collectif. Je fais du change management. Mon outil, ma façon de faire, c’est d’être avec eux et de les animer, de provoquer les conversations et de développer l’intelligence collective. Le 1er mars, toutes mes missions des 3 mois suivants (à part une) était annulées ou reportées.

 

Heureusement avec deux de mes associés, Thibault et Stéphanie, nous avions commencé à discuter des effets d’un confinement et nous avions commencé à réfléchir, tester, voir même expérimenter comment faire la même chose à distance. C’était le début.

 

Le vendredi 13 mars (le confinement a lieu en début de semaine suivante), nous envoyons un mail à 9H pour proposer un « webinaire » gratuit d’une heure sur comment animer le jour même à 18H. A 18H, nous avons 150 participants.

 

Menés par la peur du vide et par l’énergie créée par cet évènement réussi nous avons lancé animeradistance.com et proposé des sessions de « formation », de partage à l’animation à distance : le pied à l’étrier, au trot, au galop, saut d’obstacle… nous ne faisons pas de cheval mais la symbolique des termes nous parlait. L’anecdote qui nous fait encore sourire c’est que nous passons de pied à l’étrier à directement au trot… nous n’avons jamais fait de session « au pas ». Cela décrit bien l’état d’esprit du truc, la dynamique, l’envie d’avancer, d’apprendre, de partager. En faisant cela, nous développons aussi une communauté de « testeurs », des consultants ou clients avec qui nous échangeons, avec qui nous partageons nos retours d’expériences.

 

Au bout d’un mois, vers la mi-avril, l’expérience déjà acquise ou en cours d’acquisition est énorme et nous nous demandons comment continuer à partager ou à transmettre, voir même comment « poser » tout cela… D’ou l’idée assez simple d’écrire un livre. Nous continuons les sessions, nous identifions 27 co-auteurs dans la communauté qui s’est formée et nous nous lançons dans l’écriture collective d’un livre. Une expérience en soi : écrire à distance et à plusieurs sur l’animation à distance …

 

Nous lançons l’écriture fin avril et début juillet nous livrons le manuscrit à l’éditeur; corrections et finalisation pendant l’été, impression en septembre, sortie le 1er octobre et déjà une réédition, l’éditeur avait été prudent….

 

Donc pourquoi? Pour poser les pratiques que nous avons acquises et surtout les partager avec le plus grand nombre.
Le confinement a accéléré de manière incroyable la digitalisation du travail. En 6 mois, nous avons provoqué des pratiques que nous n’aurions eu que dans 5 voir même 10 ans. Nous ne sommes pas encore conscients des bouleversements des pratiques que cela créé. Si nous pouvons aider un manager, un consultant, un coach ou un formateur à avoir quelques repères, quelques bons gestes, c’est super.

 

 

Une page de votre livre, ou un passage, qui vous représente le mieux ?

 

Benjamin Gratton : Ca ne marche pas…. ce livre est co-écrit à 27! Quand tu me poses cette question, je me dis quelle page nous représente à 27?

 

Je pense à une page à la fin, un dessin d’Antonio avec la tête des 27 co-auteurs comme dans la mosaïque de l’outil Zoom. Cela me rappelle les temps à distance ensemble pour construire l’ossature du livre, décider des pratiques que nous avions envie de raconter, des éléments – des fondamentaux – à poser avant, de tout ce qu’il y à faire pour amener de « la présence à distance »…

 

 

Les tendances qui émergent à peine et auxquelles vous croyez le plus ?

 

Benjamin Gratton : Pour l’instant, le télétravail et les réunions à distances sont plutôt subies. Il est difficile de retrouver les différents niveaux de contacts que nous pouvons avoir en présentiel. d’ailleurs, le distanciel est donc très efficace.

 

Il va falloir apprendre à mettre en place les temps de discussion informelle ou de prise d’information qui sont naturelles en présentiel aussi à distance pour faire que ces réunions à distance soient autre chose que soit des “purges” ou ils ne se passent rien ou au contraire des réunions très efficaces et épuisantes. Apprendre à équilibrer cela…

 

L’autre tendance c’est de profiter des deux formats pour “hybrider” : choisir le meilleur format en fonction des besoins et des contraintes, savoir varier et même mixer…

 

Si vous deviez donner un seul conseil à un lecteur de cet article, quel serait-il ?

 

Benjamin Gratton : Si vous avez une réunion à distance, rappelez vous qu’il est quasi-impossible d’avoir une discussion libre, sans facilitation, à plus de 4 personnes. Donc soit vous prenez votre rôle de facilitateur au sérieux pour apprendre à faire varier les formats, le rythme et les modalités pour bien la conduire, soit vous ne faites pas de réunion à plus de 4 :-).

 

En un mot, quels sont les prochains sujets qui vous passionneront ?

 

Benjamin Gratton : Les projets de mes clients que j’accompagne, un autre livre sur l’Intelligence collective pour les nuls à co-écrire en 2021, le développement du collectif auquel j’appartiens et réussir ma cuvée 2020 (j’ai acheté 1,5 hectare de vigne l’année dernière dans le Minervois)…
 
Merci Benjamin
 
Merci Bertrand
 

Le livre : Animer à distance: Guide de pratiques robustes et éprouvées, Stéphanie Baumann, Elisabeth Denécheau, Benjamin Gratton, Estelle Sbinné, Thibault Vignes, Eyrolles, 2020.