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Les start-up acquises par des grands groupes finiront elles par les dévorer ?

Un grand groupe qui tue dans l’œuf une start-up qu’il a rachetée, vous connaissez ? En revanche vous ignorez ces banques, ces compagnies aériennes ou ces loueurs de voitures qui pourraient bien se fait dévorer par une jeune-pousse qu’ils avaient acquise ou une activité qu’ils avaient pris soin de développer en mode spin-off. Les grandes entreprises vont-elles se faire dévorer tels des scarabées par leurs progénitures ?

Oui, il existe un exemple dans le règne animal d’une espèce chez laquelle l’enfant mange sa mère de manière atroce ! Il s’agit du minuscule coléoptère xylophage, Micromalthus debilis. La majorité des coléoptères Micromalthus sont des femelles. Par conséquent, la propagation des mâles est vitale pour la survie de l’espèce. Ames sensibles, ne lisez pas ce qui suite…

Premier acte, une coléoptère femelle pond un œuf mâle. Deuxième acte, à peine sorti l’œuf, le tout jeune coléoptère replonge immédiatement sa tête dans le ventre de sa propre mère pour procéder à la destruction des autres mâles qui s’y logent encore. Troisième acte, il dévore ce qui reste de sa propre mère. Quatrième acte, la larve cannibale passe par une série de mutations jusqu’à devenir un mâle adulte ailé !

Et si ce cruel spectacle pouvait servir de métaphore à ce qui arrive à certaines entreprise établie devant lutter pour leur propre survie ?

En Pologne, la banque N°1 se fait digérer par ses intrapreneurs

Si vous vous rendez sur le site Web de la BRE Bank, une banque traditionnelle établie de longue date en Pologne (qui fait partie du groupe Commerzbank), vous trouverez une jolie lettre du président, Cezary Stypułkowski, expliquant que la BRE Bank va bientôt fusionner ses différentes opérations sous la marque mBank. Détrompez-vous, il ne s’agit pas simplement d’une histoire de rebranding ou de recherche de synergie en vue d’accroître l’efficacité opérationnelle. C’est le scénario d’un enfant qui mange sa mère.

Pour commencer, la BRE Bank était une banque ordinaire et ennuyeuse, avec un large réseau d’agences, des offres de produits classiques, et un service client franchement médiocre. L’équipe dirigeante a eu la vision en 2000 de réinventer la banque en Pologne en créant la meilleure des banques en ligne. Ainsi, BRE Bank a lancé mBank en 2000, une banque en ligne pure et dure. Les circonstances étaient favorables pour créer une banque numérique : l’infrastructure bancaire grinçante de l’après-communisme devait être remplacée, l’infrastructure des télécoms se développait rapidement et la téléphonie mobile était en plein essor. Quant à la nouvelle génération de consommateurs, elle était avide de nouvelles technologies…

Partie de rien, la base de clients de mBank s’est développée de manière organique avec 4,6 millions de clients particuliers et près de 18 000 entreprises clientes à la fin de l’année 2014. Comment y est-elle parvenue ? Essentiellement en offrant à un large panel d’intrapreneurs la liberté de développer l’entreprise sans interférence. Après une migration significative en juin 2013 vers une plateforme technologique ouverte, mBank offre désormais l’une des meilleures expériences de banque en ligne du monde – une interface conviviale et intuitive qui bat à plate couture les banques établies, offrant une gamme complète de services bancaires : authentification des transactions par code PIN, option de prêt en 30 secondes rendue possible par l’évaluation automatique de la solvabilité et la compensation de crédit automatique, moteur de recherche de transactions intelligent, fonction  » messages avec de l’argent  » utilisant les médias sociaux, outil de gestion des finances personnelles intégrant la fonction  » dépenser en toute sécurité « , accès unique à l’expertise en ligne par vidéo ou par téléphone 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, architecture de services API ouverts pour étendre la proposition de valeur à l’assurance, par exemple….

La mBank en ligne a en effet été une innovation étonnante et perturbatrice pour le marché de la banque de détail en Pologne et représente l’avenir évident de la société mère BRE, tout en menaçant chaque jour davantage son activité historique. Le modèle de banque en ligne influence tellement l’activité historique que l’expression de « fusion-inversée » est désormais consacrée, même si les effets complets prendront sans doute du temps à se manifester. Mais nul doute que dans quelques années, l’enfant aura pleinement digéré la mère.

Avis pourrait se faire débarquer de ses propres voitures

Prenez la société de location de voitures Avis, qui comprend les marques Budget et Zipcar. En 2011, Avis Budget a pu acquérir Avis Europe plc, réunissant la société mère basée aux États-Unis avec le détenteur de la licence pour l’Europe, le Moyen-Orient, l’Afrique et l’Asie. En janvier 2013, Avis a racheté Zipcar Inc. pour 500 millions de dollars, soit une une prime de 49 % par rapport au cours du NASDAQ de l’opérateur de réseau de covoiturage, mais une réduction de 32 % par rapport au prix d’introduction en bourse de Zipcar (18 dollars). Pourquoi le choix de cette acquisition alors ?

Zipcar a constitué une disruption dans le secteur de la location de voitures. En se concentrant principalement sur les étudiants des résidences universitaires des campus, Zipcar a offert un service pratique de location de voitures à l’heure, comblant ainsi un vide entre les transports publics et la possession d’une voiture. Zipcar s’est rapidement développée en élargissant son champ d’actions à une clientèle jeune et urbaine, a recruté plus de 760 000 utilisateurs depuis sa création en 2000. Mais elle a eu du mal à réaliser des bénéfices réguliers. Son rachat a en fait permis à Avis de devancer ses concurrents sur le marché de niche de la location à l’heure de voitures, qui est devenu ensuite un marché de près de 400 millions de dollars aux États-Unis.

Il y avait des synergies évidentes entre Avis et Zipcarcela seul pouvait justifier l’acquisition et le prix payé. Mais Avis doit-il se préparer à un monde de la location totalement bouleversé ? Zipcar pourrait-il devenir un Micromalthus ? Après tout, elle possède la plateforme, l’écosystème et la culture d’entreprise pour le faire !

Airlines, de plus en plus déboussolée par Vueling

En avril 2013, le groupe International Airlines (IAG) a pris le contrôle de la compagnie aérienne à bas coûts (LCC) Vueling. Cette acquisition était un héritage de l’acquisition d’Iberia par IAG, également propriétaire de British Airways. Mais il est rapidement apparu qu’IAG était déterminé à maintenir Vueling séparée d’Iberia et de British Airways, permettant à Vueling de continuer à concurrencé Iberia et à encourager sa nécessaire réorganisation. Willie Walsh, le PDG d’IAG, ne déclarait-il pas en avril 2013 , « Vueling fonctionnera comme une entité autonome au sein du groupe IAG. »

Mais surtout, contrairement à d’autres compagnies low cost comme Ryanair, Vueling a longtemps développé un produit hybride : une offre low cost et une offre premium axée sur les voyageurs d’affaires, assis à l’avant de l’avion. Elle a également développé une plateforme de réservation hybride qui encourage la réservation directe, mais donne également aux agents de voyage la possibilité de réserver pour leurs clients d’affaires. Le tout avec une structure de coûts nettement inférieurs couplé à la puissance d’achat d’IAG en matière de carburant, d’assurance et d’avions.

IAG voit-elle simplement Vueling comme un cheval de Troie pour transformation profondes des pratiques inefficaces, reposant une structure de coûts élevés, d’un groupe de compagnies aériennes d’un autre temps ? Ou, tandis que la rentabilité du modèle traditionnel diminue, Vueling pourrait-elle devenir un Micromalthus ?

Après avoir largement contribué à détruire la nature, les entreprises s’inspireront-elles de la nature pour, cette fois-ci s’auto détruire ? A bord d’un avion Vueling, ou au volant d’une voiture Zipcar louée avec l’application mobile de mBank, qui vivra verra.