Les marques entreront elles un jour au gouvernement
À l’occasion de la sortie de son nouvel ouvrage, « Le roman national des marques : Raconter la France d’aujourd’hui », nous avons eu le plaisir d’interviewer Raphaël Llorca. L’auteur revient sur les interconnections entre les marques, la consommation et le monde politique, nous offrant ainsi un éclairage original sur l’influence croissante des marques sur notre imaginaire politique.
Bonjour Raphaël Llorca, pourquoi avoir écrit ce livre… maintenant ?
R. L. J’ai consacré mes deux précédents livres au décryptage de stratégies politiques : post-présidentielle, j’ai ressenti le besoin de profondément me renouveler. Longtemps, j’ai cru que les marques commerciales ne faisaient que structurer la société de consommation, mais elles sont devenues des sortes d’architectes invisibles de notre société politique. Dans ce livre, je raconte la prise de pouvoir des marques sur les imaginaires politiques en abordant le “roman national”. Ma thèse, c’est qu’elles se sont engouffrées dans le vide béant laissé par les politiques.
Quelle page de votre livre, ou quel passage, vous représente le mieux ?
Les tendances qui émergent à peine et auxquelles vous croyez le plus ?
R. L. : Le monde politique et le monde marchand se sont toujours adonnés à une bataille des imaginaires. La nouveauté, c’est qu’il y a immixtion réciproque. La vision du pays, de son identité, de ses valeurs et de ses enjeux, fait désormais l’objet d’une lutte d’interprétation symbolique entre le monde marchand et le monde politique. La question de la souveraineté du monde politique sur l’imaginaire national nous semble posée.
Si vous deviez donner un seul conseil à un lecteur de cet article, quel serait-il ?
R. L. : Lire Roland Barthes !
En un mot, quels sont les prochains sujets qui vous passionneront ?
R. L. : Les marques bâtissent des imaginaires de consommation qui produisent des effets politiques. J’ai décidé de fonder un Observatoire « Marques, imaginaires de consommation et Politique » au sein de la Fondation Jean-Jaurès. Je me donne comme objectif de penser le mythe du pouvoir d’achat, le populisme consumériste, l’activisme désinformationnel, le complotisme dans la consommation, la récupération de l’idéal olympique par les marques, etc…
Merci Raphaël Llorca.
Merci Bertrand Jouvenot.
Le livre : Le roman national des marques: Raconter la France d’aujourd’hui, Raphaël Llorca, L’Aube/Fondation Jean-Jaurès, 15 septembre 2023.