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Huit leviers pour fertiliser la raison d’être de l’entreprise avec la vocation de ses salariés

La raison d’être de l’entreprise sera d’autant plus légitime et pérenne qu’elle convergera avec la raison d’y être et d’en être, de ses salariés. L’enjeu de l’entreprise n’est plus tant d’employer, au-delà d’être un formidable rassembleur de talents, que de devenir un possible creuset de la vocation de chacun de ses salariés. Pour saisir cette nouvelle opportunité, écoutons Jean Watin-Augouard, nous parler de son dernier livre : Raison d’être, raison d’y être, raison d’en être.

 

Bonjour Jean Watin-Augouard, pourquoi avoir écrit ce livre… maintenant ?

Jean Watin-Augouard : Un livre est toujours le fruit d’une longue réflexion et sa parution peut rencontrer les enjeux du moment. Ainsi de cet essai dont les premières pages ont été écrites lors de la loi Pacte (2019) consacrée à la raison d’être de l’entreprise et finalisées au moment de la « grande démission ». L’entreprise sera d’autant plus légitime et pérenne que sa raison d’être sera convergente avec la raison d’y être et d’en être de ses salariés. Comment ces derniers peuvent-ils s’engager de manière authentique et féconde dans l’entreprise quand leur raison d’y être et d’en être n’est pas clairement reconnue et stimulée ? Le pacha du navire ne peut le faire naviguer sans l’implication de tous les officiers, sous-officiers, matelots, jusqu’à la salle de machine.

L’enjeu de l’entreprise n’est pas tant d’employer, au-delà d’être un formidable rassembleur de talents, que de devenir un possible creuset de la vocation de chacun de ses salariés. A l’heure où la « grande démission » vient modifier le sens donné au travail, son organisation dans l’entreprise, et la manière de le « manager » – recrutement, engagement, fidélisation …-, ce livre vient à point nommé.  Huit leviers de transformation de l’entreprise sont proposés pour fertiliser la raison d’être de l’entreprise avec la vocation de ses salariés. L’entreprise va-t-elle saisir cette nouvelle opportunité ?

 

Une page de votre livre, ou un passage, qui vous représente le mieux ?

« Il n’est de raison d’être de l’entreprise sans raison d’y être des salariés par leur présence physique dans les bureaux et usines et d’en être par leur présence mentale, leur engagement, leur appropriation de sa raison d’être. La raison d’en être révèle, grâce en particulier à l’intelligence collaborative, que le salarié n’est pas réductible à sa seule fonction, son emploi. Au sens strict (et non comme on conçoit ces termes habituellement), les « fonctionnaires » doivent céder la place aux « actionnaires ». Pour autant, il ne s’agit pas, pour en être, d’appartenir simplement à l’entreprise ou de comprendre le sens de sa raison d’être. Adhérer aux valeurs de l’entreprise est une chose. Une autre est de s’y impliquer, s’y engager, pour agir par vocation sans pour autant s’y consacrer corps et âme ! Comme le prouvent, en particulier, les jeunes qui veulent donner du sens à leur vie, en particulier, dans et par leur métier avec un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Ainsi que les moins jeunes que la crise de la Covid 19 a conduit à s’interroger sur leur raison d’en être dans l’entreprise comme l’attestent les nombreux bilans de compétence, les recours aux coachs et les changements d’entreprise et de métiers qui s’apparentent parfois à une « grande démission ».

Au cœur de la raison d’en être, la vocation entendue comme raison d’être ou finalité de la personne sur Terre. Chacun d’entre nous est appelé à agir, avoir sa part positive, dans sa zone d’influence, pour contribuer de manière unique à un bâtir un monde meilleur. La vocation est le fil rouge qui relie ses actes, ses engagements tout au long de sa vie et leur donne sens. Cessons de définir les gens uniquement par leur emploi, demandons-leur d’abord leur « impact » souhaité, leur empreinte désirée, leur singularité ressentie, leur vocation découverte et accomplie. Chaque personne a une vocation qui la singularise et la conduit à être plus grande que ce qu’elle paraît. Un gisement de puissance, d’énergie et d’action, pour l’heure mal ou inexploité par les entreprises quand celles-ci peinent à considérer les « ressources » humaines comme des richesses. Il en est de même pour beaucoup de salariés victimes du syndrome de l’imposteur qui les conduit à être sceptiques sur leur propre valeur et à attribuer à la chance ou au hasard leur réussite. La vocation peut être à l’origine d’une transformation managériale radicale, car elle conduit à porter un nouveau regard sur les enjeux auxquels est confrontée toute entreprise : recrutement, engagement, fidélisation, attractivité, notoriété, créativité, dynamisme, singularité, pérennité… »

 

Les tendances qui émergent à peine et auxquelles vous croyez le plus ?

Jean Watin-Augouard : Le changement du rapport de force employeur/employé en faveur du second va ouvrir les portes de l’entreprise aux principes et règles de la démocratie. Une question va donc se poser : l’entreprise peut-elle ou doit-elle être une démocratie ?

 

Si vous deviez donner un seul conseil à un lecteur de cet article, quel serait-il ?

Jean Watin-Augouard : Etre intimement persuadé d’avoir une vocation. Que celle-ci légitime sa raison d’en être dans l’entreprise. Que c’est par son métier, bras armé de sa vocation, qu’il peut s’impliquer dans l’entreprise et contribuer au bien commun.

 

En un mot, quels sont les prochains sujets qui vous passionneront ?

Jean Watin-Augouard : Mener une réflexion sur la distinction entre travail, métier et emploi afin qu’ils ne soient pas subis mais choisis par vocation.

Promouvoir les personnes à « impact » positif sur le monde.

 

Merci Jean Watin-Augouard :

Merci Bertrand

Le livre : Raison d’être, raison d’y être, raison d’en être, Jean Watin-Augouard, Nombre 7, 2022.