Les coulisses de la création du phénomène BlaBlaCar
mars 28, 2022
Le digital fourmille de légendes, anecdotes et histoires en tout genre. L’une des plus célèbres concerne Google que ses fondateurs voulaient, à ce qu’on dit, initialement appeler Goggle (avec deux « g » et un seul « o ») en référence au verbe anglais to goggle, difficile à traduire en français, mais pouvant être compris comme : ouvrir grand les yeux, regarder avec stupéfaction qu’elle que chose de très grand, être ébahi, etc.
Il se raconte, qu’au moment du dépôt de la marque, une faute d’orthographe aurait conduit à enregistrer Google (avec deux « o » et un seul « g » cette fois-ci) au lieu de Goggle.
La faute de frappe, l’erreur d’orthographe, sont humaines. La preuve, les meilleurs en font aussi. C’est bien pour cela que les correcteurs orthographiques comme celui de Word ont vu le jour.
Mais derrière l’apparente banalité de ces simples correcteurs, une surprenante mutation est à l’œuvre.
Si Larry Page et/ou Sergey Brin avaient écrit « google » dans Word, c’est-à-dire le mot « goggle » avec une faute, deux phénomènes auraient pu se produire :
Jusqu’ici rien de bien effrayant puisque la machine n’intervient que sur la forme et non sur le fond du texte.
Mais l’AI (Artificial Intelligence ou Intelligence Artificielle en français) de Google permet désormais à un utilisateur d’autoriser la machine à corriger même le fond du texte qu’il écrit. Google parle à ce sujet de son truth-checker (vérificateur de vérité) auquel il a donné le nom de Knowledge-Based Trust (sans erreur d’orthographe cette fois-ci).
Ainsi, si nous écrivons : « Marc Levy est un peintre Hollandais du dix-neuvième siècle ». A l’instant même où nous frappons sur les touches de notre clavier, l’algorithme de Google contrôlera la cohérence de l’information en allant effectuer des vérifications dans les différentes encyclopédies en lignes, les dictionnaires des noms propres, les sites littéraires et autres Wikis, pour changer le texte et remplacer « peintre » par « écrivain », « Hollandais » par « Français » et « du dix-neuvième siècle » par « contemporain ».
De la même manière, si nous écrivons : « Nicolas Gogol est un philosophe Allemand auteur du Journal du séducteur ». Même scénario. Google rétablira la phrase pour que soit écrit en définitive : « Nicolas Gogol est un écrivain Russe auteur du Revizor(restituant par la même occasion le Journal du séducteur à son auteur Danois Soren Kierkegaard).
C’est donc assistés par des millions de données, elle mêmes servies par l’intelligence artificielle d’un Google, que nous écrirons demain.
A chacune des phrases que nous rédigerons, des suggestions nous seront faites, issues de ce que d’autres avant nous auront écrit.
Le style, compris comme un écart par rapport à une norme littéraire, sera immédiatement ramené à l’expression la plus commune.
Toute tentative de pensée divergente, originale ou authentique sera immédiatement invitée par la technologie à rentrer dans le rang, à s’inscrire dans la norme, à converger vers ce qui la précède.
La somme de ce qui fut un jour écrit deviendra l’aimant qui attire tout ce qui se dit de nouveau à retourner vers le passé pour mieux s’y enraciner et encore moins s’en émanciper.
Sous couvert de modernité, de progrès et de future, la technologie contribuera davantage à une implosion qu’à une explosion des connaissances, du moins de leur diversité.
Les grands esprits ne se rencontreront plus, aux toilettes, mais derrières des écrans.
L’algorithme de Google tenant compte des comportements de tous les utilisateurs en les combinant à nos comportements propres, deux personnes différentes se verront corrigées différemment :
Pour l’heure et depuis cette faute d’orthographe à l’origine du nom de la plus puissante société du monde, le nom de Google est devenu un verbe « to google » qui fit son entrée dans le très exigeant Oxford Dictionnaries.
Le monde change, la langue change… et la technologie s’immisce partout. Charge à nous de savoir lire entre les lignes pour débusquer ce qui est à l’œuvre, derrière nos propres mots, à défaut d’écrire des chefs d’œuvre comme Marc Levy ou Nicolas Gogol.