Au cœur de l’incompétence : Isabelle Barth fait tomber les masques dans un livre courageux
Comment mon chef, mon patron, mon manager est-il arrivé à ce poste, avec ces responsabilités, en étant aussi nul ? Comment peut-il rester en poste, alors qu’il est incompétent, et que tout le monde le sait ? La direction par les incompétents, le règne des médiocres, une situation assez commune que vous avez peut-être rencontrée, ou que vous vivez actuellement dans votre vie professionnelle. Isabelle Barth décrypte les mécanismes à l’œuvre dans un livre courageux et politiquement incorrecte : La kakistocratie ou le pouvoir des pires: Voyage au cœur de l’incompétence (EMS).
Bonjour Isabelle Barth, pourquoi avoir écrit ce livre … maintenant ?
Isabelle Barth : Parce qu’il y avait urgence ! Tout a commencé avec une courte vidéo de 3 minutes sur la chaine @Xerfi Canal en 2017 déjà et j’ai eu tellement de retours ! Des témoignages des remerciements des interpellations ! Tout le monde se reconnait dans ces kakistocraties peut être à tort d’ailleurs car ce peut être une facilité de trouver sa gouvernance ou son manager incompétent : « Tous nuls sauf moi « ? Est-ce bien sérieux C’est pourquoi je challenge beaucoup les jugements dans le livre et j’invite le lecteur à penser contre lui. J’ai été à l’écoute pendant 3 années et j’ai pensé être arrivée à « saturation » d’informations comme on dit dans notre jargon de chercheurs ; Mais je lance un appel : j’aimerais être surprise ! Car il y a surement des situations que je n’ai pas su identifier. Et j’aimerais tant avoir un témoignage de kakistocrate : un chef d’entreprise une directrice de Business Unit qui savent qu’ils sont des gros incompétents mais qui ont réussi à gravir les échelons ou tenir une place de pouvoir malgré ou grâce à cette incompétence. A vous le micro !
Une page ou un passage qui vous représente le mieux
Isabelle Barth : La dernière phrase ; « un chercheur est un compétent de son incompétence » plus j’avance plus c’est vrai. Cela rappelle la chanson de Gabin (pour les boomers : « Je sais qu’on ne sait jamais ». C’’est tellement vrai et tellement stimulant ! Je prends souvent l’image de l’exploration d’une forêt la nuit avec une lampe de poche plus on avance plus on voit l’étendue de l’espace et plus on découvre mille énigmes à résoudre. Car la recherche c’est résoudre des énigmes c’est poser des « pourquoi ? » les chercheurs sont de grands enfants Faire de la recherche c’est tout le temps et partout ! C’est regarder un phénomène microscopique et essayer de comprendre comment ça marche comment on en est arrivé là. Et c’est cette confrontation avec le monde mystérieux des théories car les théories comme les concepts aident à comprendre. Comme la lettre K est à l’honneur c’est cette question fondatrice : « De quoi ce cas est-il le cas ? ». Et c’est là qu’on grimpe sur les épaules de nos prédécesseurs et qu’on se rend compte que l’humain est ce qu’il y a de plus complexe de plus manipulateur de plus clignotant ! Mais aussi que des phénomènes sont là depuis la nuit des temps : je suis certaine qu’il y avait des chefs de tribus préhistoriques qui étaient de gros incompétents (ou incompétentes car on sait maintenant que les femmes préhistoriques ne se contentaient pas de balayer la caverne !)
Les tendances qui émergent à peine auxquelles vous croyez le plus ?
Isabelle Barth : Je vois émerger plein de tendances ! Sont-elles nouvelles ? Sont-elles disruptives ? Et chaque tendance contient en germe son contraire : globalisation/relocalisation IA/humain Individualisation/conformité etc. etc. … Ce qui complique les analyses. Si je me lance quelques tendances émergentes en me limitant à la sphère du travail : L’exigence du consentement : je veux être maitre de mes choix ! La prise de conscience de valeurs qui ne sont pas calculables : la recherche de ce qui n’est pas substituable ! Après des décennies à empiler à compter à remplacer … Une approche différente de la vulnérabilité : on comprend mieux qu’être handicapé peut être une force être dys peut amener à d’autres chemins de la performance ! J’attends le moment où le discours de performance de soi va petit à petit s’éteindre pour revendiquer la sérénité … à suivre ! L’invitation dans mon livre à avoir un autre regard sur l’incompétence s’inscrit dans ce nouveau paradigme.
Si vous deviez donner un seul conseil à un lecteur de cet article : quel serait-il ?
Isabelle Barth : Je l’inviterais à « être gentil » avec cette citation de Ian McLaren : « Chaque personne que tu rencontres mène un combat dont tu ne sais rien. Sois gentil. Toujours » C’est souvent un combat contre soi-même mais c’est un beau combat !
En un mot quels sont les autres sujets qui vous passionneraient ?
Isabelle Barth : Un sujet qui me passionne déjà car j’ai commencé ma nouvelle enquête : je travaille sur l’invisible dans les organisations ! L’enjeu est de mettre au jour le caché le tabou l’invisible l’immatériel … A suivre
Merci Isabelle Barth
Merci Bertrand Jouvenot
Le livre : La kakistocratie ou le pouvoir des pires: Voyage au cœur de l’incompétence, Isabelle Barth, EMS, 2024.