jouvenot.com

Structure juridique de l’entreprise individuelle : choisir la CAE [Article invité]

La CAE est une structure juridique de gestion d’entreprise très méconnue en même temps que très efficace et durable, synonyme de réseau et de sécurisation de l’activité.

Faisant partie d’une CAE depuis 8 ans (Régate, dans le Tarn – 81), voici mon témoignage quant à cette forme de gestion de mon point de vue d’entrepreneur.

Cette présentation ne se veut pas exhaustive, et je vous invite à entrer directement en contact avec la CAE de votre territoire pour obtenir des informations plus détaillées et précises sur les points qui vous intéressent le plus.

 

Une CAE est une Coopérative d’Activités et d’Emploi. Elle regroupe autant des entrepreneurs en activité que des porteurs de projet qui ont encore besoin de tester leur activité ou de confirmer leur projet de devenir entrepreneur. Et c’est que la vocation d’une structure comme celle-ci est de mettre à disposition les moyens nécessaires pour accompagner les entrepreneurs vers le succès de leur activité. Toutes les initiatives entrepreneuriales sont accompagnées par une équipe d’appui, spécialisée dans les différents aspects de la gestion d’entreprise, qui est présente et disponible à chacune des étapes de développement de l’activité.

Système coopératif

Comme son nom l’indique, il s’agit d’une organisation de type coopératif.

La coopérative est une forme de fonctionnement entrepreneurial dont les origines remontent au début du XIX siècle en Grande Bretagne, même si des initiatives ayant un format similaire sont enregistrées déjà au Moyen-Âge en France dans le secteur agricole.

Le caractère de la coopérative implique la mise en commun des efforts dans le sens d’un même objectif avec un système gagnant-gagnant dans lequel si l’individu gagne, la coopérative gagne, et vice-versa. On se renforce mutuellement par l’investissement de chacun.

Dans le cadre de la gestion de son entreprise, la coopérative apporte à l’entrepreneur un réseau de compétences et d’expériences qui sont partagées avec lui, ainsi qu’une structure solide qui fonctionne déjà ; l’entrepreneur quant à lui, qui est un membre actif, apporte à son tour à la coopérative le fruit de son travail et de son succès sur la base duquel il gagne sa vie.

En tant que modèle économique, les deux entités vont dans le sens d’un succès commun et d’une durabilité de la structure et de l’activité.

En ce sens, une coopérative implique une transparence et un système solide d’autoprotection, qui garantissent sa pérennité.

 

Entrepreneur-salarié

 

Dans une CAE, l’entrepreneur, après une première phase éventuelle de test ou de lancement de son activité, devient un entrepreneur-salarié. Deux ans plus tard environ, il doit décider s’il souhaite devenir aussi associé de la coopérative à part entière, en acquérant par là-même le droit de vote aux assemblées et la possibilité d’assumer des fonctions administratives au sein de la structure.

 

Un entrepreneur-salarié est un entrepreneur, et c’est aussi un salarié.

L’individu qui intègre cette structure de gestion, demeure un entrepreneur indépendant à part entière : il est maître et responsable unique de sa politique commerciale, de sa relation client, de ses choix stratégiques, de la qualité de son travail, dans le seul respect des règles administratives et comptables. Il décide de ses actions, de son temps de travail et de sa rémunération sur la base d’une gestion comptable rigoureuse de son activité.

Par le flux de gestion financière généré par l’activité de l’entrepreneur, dans ce type de structure l’entrepreneur acquiert un statut de salarié. En effet, la coopérative se constitue en acteur du flux, dont le rôle consiste, outre ses fonctions d’appui et accompagnement, en la gestion financière et l’appui comptable de l’activité, le circuit étant le suivant :

  • L’entrepreneur réalise sa démarche commerciale, sa relation client, ses prestations et sa facturation.
  • La facturation est encaissée dans les comptes de la coopérative.
  • L’équipe d’appui de la coopérative prend en charge le traitement et le paiement des charges patronales et sociales, des impôts et taxes éventuels, la gestion de la TVA.
  • L’entrepreneur est rémunéré après déduction des charges et taxes ci-dessus, en fonction de son volume d’affaires, sous la forme d’un salaire.

 

Par là même, l’entrepreneur, en tant que salarié, acquiert les avantages de ce statut, ce qui lui octroie une large couverture sociale et lui fait bénéficier des prérogatives propres au droit du travail (assurance maladie, vieillesse, chômage, …). Comme pour toute entreprise en France, la structure prévoit également un système de mutuelle de santé pour chaque salarié.

 

De cette façon, l’individu jouit de la marge de manœuvre et des responsabilités de tout entrepreneur, tout en profitant des bénéfices financiers, sécuritaires et sociaux propres au salariat.

 

Si ce modèle est initialement prévu pour des entrepreneurs individuels, le système permet également des petites associations ou partenariats entre entrepreneurs, et différentes expériences concrètes témoignent en ce sens.

 

Quelques avantages inhérents

Outre les éléments déjà indiqués ci-dessus, ce type de fonctionnement implique des avantages inhérents au mode d’organisation :

  • Membre d’un réseau: en devenant entrepreneur-salarié dans une CAE, on devient de facto membre d’un réseau, aux côtés d’autres entrepreneurs qui ont choisi ce même modèle de fonctionnement. En général, ces structures intègrent des entrepreneurs aux métiers très variés, ce qui permet à chaque individu de côtoyer des compétences complémentaires, voire des générer des partenariats dans le sens de projets communs ou de prestations entre entrepreneurs. La dimension de réseau et l’approche coopérative de la structure implique aussi une tendance au partage d’expériences, d’informations et à un certain niveau de décloisonnement de l’activité en solitaire propre à l’entreprenariat individuel.
  • Mutualisation de moyens: qui dit réseau et coopérative, dit mutualisation de moyens. La structure permet, selon le fonctionnement propre à chaque CAE, de profiter d’achats groupés de biens ou de services (assurance professionnelle, outil de gestion comptable, mutuelle, …) ; de renforcer la visibilité de la structure et de chacun de ses membres par l’action de chacun dans le sens autant du collectif que de l’individuel ; de bénéficier en commun de certifications et autres labels (formation, qualité,…) grâce au travail de l’équipe d’appui et à la responsabilisation des membres ; de bénéficier d’outils de gestion communs (outil de gestion comptable, plateforme collaborative en ligne, …) ; etc.
  • Délégations: la prise en charge par la CAE des activités de gestion des flux financiers, tel qu’indiqué ci-dessus, implique une forme de délégation de la part des entrepreneurs d’une partie des activités propres à leur statut, notamment sur le plan comptable. L’entrepreneur conserve néanmoins la responsabilité incontournable de tenir à jour ses comptes, sa facturation, la gestion des paiements et des relances éventuelles, …
  • Formation permanente, accompagnement, suivi: dès l’entrée dans la CAE, l’entrepreneur bénéficie d’ateliers de formation, de séances d’accompagnement, destinées à améliorer et à développer son activité d’entrepreneur sur les différents plans (gestion comptable, tarification, communication, commercialisation, …). L’équipe d’appui est disponible et à l’écoute pour répondre aux questions, aider à résoudre les situations, informer, … accompagner dans les différents aspects de l’activité. Il ne s’agit pas d’une prise en charge, mais bien d’un accompagnement vers l’accomplissement de l’activité.

 

Des freins éventuels 

Toute forme d’organisation a ses contraintes et ses limites. De la même façon, une organisation en CAE présente des aspects qui peuvent constituer un frein éventuel à l’activité ou à certaines de ses facettes. Je vous en présente quelques-unes sans, encore une fois, tendre à l’exhaustivité :

  • Entrepreneuriat individuel: comme dit plus haut, ce type de structure est prévu pour des entrepreneurs individuels, voire des petits partenariats entre entrepreneurs individuels. Si une activité entrepreneuriale devait se développer vers une structure de type sociétal, il faudrait prévoir une évolution du statut juridique en ce sens.
  • Charges à prévoir: en comparaison avec un statut comme celui de la micro-entreprise, dans une CAE les charges déduites de la facturation brute sont plus conséquentes, puisqu’on s’inscrit dans le droit du travail et qu’on fait partie d’un réseau et d’une coopérative qui nous apportent et auxquels on apporte. Mais par ailleurs ces charges permettent de prévoir d’éventuelles circonstances difficiles de type maladie-vieillesse-chômage-frais de santé, et de bénéficier de tous les avantages cités ci-dessus. Pour ma part, le défaut de trésorerie qui en ressort est largement compensé par tous les avantages obtenus : avantages sociaux, mutuelle de qualité, assurance professionnelle à moindre coût, séances de formation, outil de gestion, équipe d’appui, réseau professionnel, …
  • Statut méconnu: en effet, ce statut est relativement récent dans le secteur de l’entrepreneuriat et il est largement méconnu par les différents acteurs de l’économie. En conséquence, il n’est pas prévu dans certains milieux professionnels et dans certains contextes de contractation (plateformes en ligne, certaines collaborations ou partenariats à l’étranger, grosses entreprises ayant des routines administratives très ancrées, …).

 

En définitive, d’après mon expérience la structure juridique de type Coopérative d’Activités et d’Emploi pour la gestion de son entreprise, si elle ne peut pas convenir à tout le monde, elle constitue néanmoins une mine d’opportunités pour les porteurs de projet et pour les entrepreneurs individuels qui souhaitent tester et développer leur activité tout en ayant un réseau de collaboration qui sécurisé l’activité et son évolution.

Une CAE est une structure avec un statut hybride qui a dû se chercher pendant des années, même sur le plan juridique, mais qui est à l’écoute des évolutions de la société, des marchés, du monde de l’entreprise et de ses besoins et contraintes. C’est un tissu humain, avec toute la richesse qui en découle due à son caractère coopératif, et qui est ouvert aux influences et aux actions issues d’autres modes d’organisation, ainsi qu’aux initiatives de chacun des entrepreneurs.