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La question qui tue à Jean-Marie Huet

Professeur agrégé, Jean-Marie Huet étudie l’informatique depuis ses débuts jusqu’aux avancées les plus récentes de la révolution numérique d’aujourd’hui. Il partage le fruit de sa réflexion dans une trilogie baptisée La révolution numérique de demain, composée de trois livres. Aucune excuse donc pour le laisser échapper au difficile exercice de la question qui tue. Nous lui avons donc demandé : « Le développement de l’intelligence artificielle s’accompagnera-t-il de l’apparition d’une bêtise artificielle ? « 

 

 

Question très pertinente ! J’espère y répondre sans me faire tuer « virtuellement : VR ».

L’IA est un grand défi ayant commencé dans les années 1940….. et toujours pas fini : cf tome I (pages 45 à 57). J’y reviendrai dans le futur tome III : l’IA me semble être un abus de langage, ou une mauvaise traduction directe de l’américain « Artificial Intelligence » provenant de Mc Carthy, un des pionniers de cette branche. Une définition, personnelle, me semblerait plus judicieuse : Intelligence Algorithmique, ou mieux Intelligence Augmentée. C’est le domaine privilégié de l’informatique (systèmes experts, deep learning,…) qui étudie comment faire faire à l’ordinateur des tâches (fastidieuses) pour lesquelles l’homme semble toujours être le meilleur, surtout pour les prises de décision finale (domaine militaire, secteur médical, industrie du futur…). La seule exception réside dans les jeux (en 1996, G. Kasparov, champion du monde d’échec, est battu par le logiciel Deep Blue d’IBM. Idem pour le jeu de GO. Maintenant, c’est au poker qu’une IA a battu des humains). Rien d’étonnant : l’IA est programmé par des humains, et ne peut que reproduire des comportements humains (améliorés par l’auto-apprentissage). Le poker repose sur le bluff, la ruse…. Ces qualités seront désormais à partager avec les machines, par contre incapables de sensibilité.

En ce qui concerne la bêtise (manque d’intelligence ou de jugement), elle n’est pas et ne sera jamais artificielle. Elle est naturelle, chez l’être humain et est souvent le produit d’une certaine culture (familiale, personnelle…).

 

Seuls, le cerveau humain et la volonté de l’individu de progresser dans son instruction peuvent surmonter ce problème. Il y a maintenant, grâce à internet (MOOCs en ligne….), d’énormes possibilités pour apprendre, donc diminuer cette bêtise.

 

En conclusion, aucun algorithme de Bêtise Diminuée, pour s’enrichir intellectuellement, ne verra le jour !

 

On pourra toujours concevoir une IA meilleure que l’homme dans de nombreux domaines (sans oublier que l’IA faite par les hommes, n’existe que pour servir l’homme). Des sociétés (Microsoft,…..) semblent injecter, maintenant, beaucoup d’argent pour des projets d’Open AI (AGI : Artificial General Intelligence). Il ne s’agit pas de détrôner l’homme, mais de lui fournir des capacités plus performantes. Cela ne résoudra absolument pas le problème de la Bêtise Artificielle.

Il y a une situation préoccupante, qui m’inquiète lors de cette révolution numérique : ceux qui utiliseront « rationnellement » Internet » où tout est possible (sans addiction), et ceux qui en seront exclus, ou s’en excluront naturellement !

 

Merci Jean-Marie Huet

 

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Le principe de la Question qui tue et les règles du jeu sont simples :

1 – L’interview est composée d’une seule et unique question.

2 – Celui ou celle qui répond, doit le faire exclusivement par e-mail.

3 – L’interviewé a carte blanche et nous n’intervenons aucunement sur sa réponse.

4 – La réponse doit contenir à minima une dizaine de lignes, mais peut faire plusieurs pages.

5 – Toutes les photos, tous les liens hypertextes, toutes les vidéos, sont les bienvenues.

6 – L’interview est publiée sur le blog de Bertrand Jouvenot et sur Linkedin

7 – L’interviewé fera de son mieux pour répondre aux commentaires laissés sur Linkedin et Twitter notamment.